Scorned (2014) : Tromper n’est pas jouer

Scorned, de Mark Jones, nous rappelle ce qu’on risque en jouant les infidèles : d’abord, ça fait pleurer les gens, et ensuite, ça leur fait péter une durite et on se retrouve séquestré-e et torturé-e. Et c’est fort dommage.

scorned

AnnaLynne McCord, après des passages remarqués dans les séries Nip/Tuck et 90210 (la nouvelle version de Beverly Hills), semble avoir pris goût au monde de l’horreur. Elle a déjà impressionné pas mal de monde avec sa performance dans Excision (faudra que je me décide à vous en parler un jour putain) et s’illustre aujourd’hui dans un registre un peu plus soft avec Scorned (réalisé par Mark Jones, le créateur de Leprechaun), un petit film sans prétention qui rappelle que tromper, c’est mal, surtout quand on a une petite amie un peu instable.

De l’intérêt de verrouiller son téléphone

La voici donc dans le rôle de Sadie, une jeune femme pétillante et folle amoureuse de son petit-ami Kevin (Billy Zane), qui semble largement partager ses sentiments. Il fait beau, il fait chaud, ils s’apprêtent à passer un super week-end dans une immense baraque, le whisky coule à flots et tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. Jusqu’à ce que Sadie mette la main sur le téléphone de Kevin et tombe nez à nez avec un message de Jennifer, sa meilleure amie – incarnée par Viva Bianca, qu’on détestait déjà tous dans le rôle d’Ilithyia, dans la série Spartacus. Elle découvre alors l’ampleur des dégâts en dévorant l’historique et apprend que son cher Kevin se tape sa meilleure amie depuis un bout de temps et qu’il lui a même promis de tout lui avouer ce week-end. Ouch.

Si une telle mésaventure devait vous arriver, comment réagiriez-vous ? 

  1. Vous fondriez en larmes sur place avant de débouler dans le salon pour hurler sur Kevin en faisant des bulles de morves puis finiriez par attraper vos affaires et partir en courant pour passer le reste du week-end à vous déshydrater sous la couette ?
  2. Vous vous jetteriez sur Kevin pour lui mettre autant de baffes dans la gueule que possible avant de vous ruer chez votre meilleure amie pour en faire de même ?
  3. Vous séquestreriez Kevin et Jennifer pendant tout un week-end pour les torturer psychologiquement et physiquement jusqu’à épuisement sans jamais montrer une once de pitié ?

Si  vous avez choisi la troisième proposition, c’est que vous avez beaucoup plus de points communs avec Sadie que de raison, et je vous conseillerais donc d’aller consulter et de vous tenir éloigné-e de tout objet contondant.

Vous l’aurez donc compris : Sadie n’est pas tellement du genre à pardonner facilement. En découvrant cette terrible trahison, elle décide donc de séquestrer son Kevin et d’attirer la vilaine Jennifer dans ses filets pour la faire profiter de sa vengeance. Une fois les deux traîtres ligotés et maîtrisés, les hostilités pourront enfin être lancées.

Sadie-Masochisme à la sauce M6

Si l’on devait décortiquer l’ADN de Scorned, on y trouverait pas mal d’éléments similaires aux téléfilms qui pullulent tous les après-midi sur M6. Tout reste globalement très lisse tout au long du film, et, après pas loin de dix ans de domination du torture porn dans les abysses du genre, les châtiments infligés par Sadie nous paraissent soudain bien fades et assez peu terrifiants. D’un autre côté, ça repose.

J’avais préparé une tirade sur le choix du prénom de la « sadique », parce que c’était franchement trop gros pour être vrai, mais c’était avant d’apprendre que le film avait été co-écrit par Sadie Katz, et qu’il s’agissait donc plus d’une affaire d’égo que de jeu de mots foireux. J’avoue être un peu déçue, c’est pourquoi j’ai choisi de faire le jeu de mot le plus pourrave possible dans mon intertitre, pour compenser.

scornedviva

Côté acteurs, Billy Zane et AnnaLynne McCord font leur job, sans tomber dans la caricature mais sans nous éblouir pour autant. Ils nous ont tous les deux habitués à mieux, mais on a également vu pire, et vu le niveau du film, on peut déjà s’estimer heureux de les voir tenir leur rôle jusqu’au bout. Si Billy Zane restera avant tout dans nos esprits pour ses rôles dans Titanic ou Twin Peaks par exemple, il gardera toujours une place dans mon coeur en tant qu’interprète d’une des meilleures répliques du cinéma d’horreur, vue dans Le Cavalier du Diable (Demon Knight) :

Depuis le temps que je cherchais une excuse pour la replacer quelque part celle-là.

L’excuse de la camisole

Parmi les trucs qui m’ont dérangée dans le film, on peut compter l’explication du comportement de Sadie – il s’agit d’un petit spoiler sans gravité donc n’hésitez pas à sauter ce paragraphe si vous voulez la surprise, mais si vous ne résistez pas, ça ne devrait pas vous gâcher grand chose. En effet, Sadie n’est pas qu’une simple nana comme les autres qui a pété les plombs en découvrant la trahison de son mec et de sa meilleure amie – si elle agit comme ça, c’est avant tout parce qu’elle est complètement pétée du casque et qu’elle a passé plusieurs années dans un hôpital psychiatrique pendant son adolescence. Elle n’en était donc pas à son coup d’essai en ce qui concerne les vengeances vaguement disproportionnées.

Et ça me dérange parce que je trouve ça facile. Pour une fois, j’aimerais bien voir un personnage péter un plomb pour aucune autre raison que ce qui semble l’avoir poussé à bout en premier lieu. J’aimerais bien qu’on puisse se dire « Ok, donc concrètement, ça pourrait m’arriver ou arriver à mon voisin demain. Un jour tout va bien et le lendemain, bim, je tue huit personnes parce qu’on m’a marché sur le pied« . Ça me paraît quand même plus flippant et déstabilisant, parce que dans le cas de Scorned, on peut se rassurer en se distanciant du personnage de Sadie parce qu’on est pas comme ça nous, on est pas fous, ah ça non. C’est trop facile de pousser un personnage à bout et de recadrer l’histoire en nous livrant une explication toute faite pour ses actions. Il n’y a rien de plus flippant que quelqu’un dans notre entourage très proche puisse péter un câble du jour au lendemain, sans antécédents.

scornedsadie

Enfin bref, du coup c’est pas le cas de Sadie, elle est défaillante de naissance, du coup non, ça pourrait pas arriver à tout le monde, parce que tout le monde n’a pas une psychopathe en puissance dans son entourage – et du coup personne ne flippe. On peut pas se dire « Haha, j’y réfléchirai à deux fois avant de tromper ma meuf/mon mec/coucher avec la meuf/le mec de mon/ma meilleur-e ami-e maintenant ! » parce qu’on sait très bien que ces gens là n’ont pas tué de bébés chats dans leur enfance et qu’au pire ils nous supprimeront juste de leurs amis Facebook, alors super l’enjeu hein, pourquoi se priver ?

Et moi j’aime bien les films qui me poussent à repenser mes choix de vie (genre comme quand Les Dents de la Mer te pousse à passer le reste de ta vie dans le petit bain d’une piscine chlorée dont l’eau est composée à 60% de sécrétions humaines pour éviter de te faire croquer le cul par Bruce et ses petits potes). J’aime bien quand ils rendent mon quotidien inconfortable et me retirent tous les éléments familiers sur lesquels je me reposais jusque là. Bon, c’est pas non plus comme si je m’attendais à ce que Scorned me change la vie, mais quand même, j’aurais bien aimé qu’il essaye au moins.

En conclusion, parce que ça fait déjà beaucoup de texte pour un film sur lequel il n’y a au final pas des masses de choses à dire, je recommanderais quand même Scorned pour les dimanches pluvieux de grosse flemme sous la couette, parce que ça passe tout seul, que c’est propre et lisse et pas trop mal interprété, et qu’on ne risque pas de traumatiser grand monde avec les scènes de torture 0% que le film daigne nous offrir.

5 réflexions sur “Scorned (2014) : Tromper n’est pas jouer

  1. Grand merci!! En particulier pour la référence à cet excellent (film passé inaperçu!) Cavaliers de l’Enfer!! ^^ Génial ton blog (une fan de roméro carrément féministe sur les bords et pas seulement!)

  2. Si un après-midi je m’ennuis je sais quoi regarder pour me détendre ! Hormis la petite scène du chien dans le micro-onde (quand c’est pas le chat dans le four ou la partie congèl).
    J’ai découvert après avoir vu les Chroniques de l’horreur sur youtube, j’adore ce blog et ton style d’écriture !

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